Cette année, comment allez-vous passer Halloween ? Au Japon, la fête de Halloween s’étant répandue d’année en année, fait dorénavant partie des habitudes joyeuses. Cette année, la grande intersection de Shibuya, réputée pour ses passages cloutés permettant de traverser dans tous les sens, est envahie de personnes déguisées ; ce facteur semble indiquer un engouement pour cette fête de plus en plus populaire, un désir accru de vouloir se déguiser. Si tel est votre cas, avant Halloween, vous pouvez aller à « Kagurazaka », connu en raison du nombre important de Français y habitant, et aussi pour son défilé de personnes déguisées en chats « Kagurazaka baken neko paraido ».
Ce défilé de chats de Kagurazaka ainsi nommé par le bureau officiel représenté par Yuko Okameya, précise que la simple manière de participer, puisque c’est gratuit, est de choisir le thème du chat. Les participants se rassemblent à la station de métro Kagurazaka, sur la ligne Tozaisen, à proximité d’une maison de retraite vers 10 heures du matin. La parade commencera à 14 heures, et entre temps, on se maquille (compter entre 500 et 1000 yens) et on s’habille. La parade part de devant la maison d’édition de partitions, « Ongaku no Tomosha », et descend la grande rue de Kagurazaka jusqu’à la station de métro « Iidabashi » ( sortie B3). Après être revenu au point de départ devant « Ongaku no Tomosha », le défilé s’engage tout doucement vers une montée. Après 15 heures, devant le même établissement, « Ongaku no Tomosha », les gens arrivent par vague successive ; C’ est alors la fin de la parade. Ce jour-là, sans aucune distinction d’âge, de sexe et de nationalité, familles, couples, amis, étrangers, groupes divers, tout le monde est invité à se rassembler et à participer .
Il y aura une grande variété de déguisement, allant du plus simple, des oreilles de chat au plus complexe, un kimono de son choix ou un costume intégral de chat ; des groupes se forment d’après les déguisements.
Pendant la parade, les participants et les spectateurs peuvent s’amuser à prendre des photos ; autre grand plaisir, on peut fréquenter restaurants et magasins des alentours. A 700 mètres de la rue de Kagurazaka, il y a du monde partout. En vu de ce jour, les pâtissiers préparent des douceurs avec des motifs de chat. Kagurazaka est complètement métamorphosé en un univers de chat.
A l’origine de cette parade, le roman de Natsume Soseki, intitulé « Wagahai wa neko de aru » (Je suis un chat), évoque les lieux de Kagurazaka. Cet évènement conçu en 2012, a le mérite de faire connaître le quartier.
Depuis longtemps, l’expression « Baken neko », d’après un grand dictionnaire japonais ancien, signifie l’existence d’un chat possédant le pouvoir de se transformer en un humain. « Neko bakemono » veut dire littéralement un « monstre de chat ». Le défilé porte bien son nom.
L’organisateur, pris au jeu a publié de petites annonces pour recruter des volontaires : « Besoin de pattes de chat ». Une tournure de phrase bien amusante ! Sur son site, des explications écrites en anglais précisent que cette parade est spécialement dédiée au chat. La présence des étrangers est vivement souhaitée. La parade a lieu le même mois que Halloween, et par conséquent on peut espérer une synchronisation des deux évènements.
Cette année, la fête change de nom et devient « Kagurazaka baken nenko festival » et aura lieu le dimanche 18 octobre. Amoureux des chats et bien sûr tous les autres, n’hésitez pas à venir participer à ce festival !
L’expérience d’une culture étrangère dépasse bien évidemment la langue, l’histoire ou la cuisine. Qui veut découvrir l’autre dans toute sa vérité ne devra pas ignorer les aspects culturels les plus choquants qui ressortissent pleinement de l’identité collective d’un pays. Des lors, s’il est primordial de savoir « vivre » avec l’autre, il n’en est pas moins nécessaire de savoir « mourir » selon les us et coutumes de son pays d’accueil. Eh oui vous l’aurez compris, cet article sera glauque. Ames sensibles s’abstenir ! On ignore trop souvent cet évènement de la vie quotidienne qui peut néanmoins s’avérer gênant, voire traumatisant, pour l’étranger naïf pétri de préjugés et ancré dans ses habitudes culturelles.
On dit souvent que les Japonais naissent dans le shinto, se marient dans le christianisme et meurent dans le bouddhisme. Comme meurt-on dans le bouddhisme ? Et bien pas très bien si vous voulez mon humble avis. Nous le savions tous, la vie est une histoire qui se termine globalement mal, au Japon vous n’avez pas idée ! Mettons nous en situation ! Vous recevez tout d’abord l’appel fatidique, l’annonce funèbre du départ d’un proche. Jusque-là, pas de fossé culturel particulier. il vous faudra juste avoir appris la formule consacrée aux condoléances (この度お悔やみ申し上げます kono tabi okuyami moushiagemasu). Ensuite les choses se gâtent…
Vous devrez vous rendre au domicile du défunt pour vous recueillir au-dessus de son cercueil…ouvert. Cette pratique qui n’est pas étrangère à la France s’est néanmoins perdue et peut s’avérer difficile pour ceux qui ne s’y sont pas préparés. Près du défunt se trouvent également des bâtons d’encens à faire bruler toute la nuit. Lorsque vous serez amené à vous exécuter, allumez les bâtons d’encens, ne les mangez pas ! (Ne riez pas, ça s’est vu ! Je ne cite aucun nom mais j’ai mes sources !). Je vous passe les divers rituels qui peuvent varier selon les doctrines pour passer au moment fatidique de la crémation. Je ne résiste pas à l’envie de vous raconter une expérience personnelle qui m’a pour le moins laissé sans voix. Rassemblés le lendemain de la veillée funèbre au crématorium, les invités participent pleinement au rituel et sont amenés à manipuler le défunt, ou plutôt ce qu’il en reste. Les cendres et os sont apportés sur une table et doivent être placés dans la dernière demeure du défunt, l’urne. Histoire de ne pas passer l’éternité la tête à l’ envers, ce qui ne doit pas être très agréable, les os sont mis des pieds jusqu’au crane. On ne les jette pas nonchalamment dans l’urne cependant !
Attention, nous passons aux choses sérieuses ! Quelle ne fut pas ma surprise quand les invités ont commencé à se mettre en rang par deux face aux ossements devant les membres de la famille du défunt, bouleversés évidement par l’évènement. Les vingt personnes devant vous vous empêchent de voir ce qu’il se passe, pourtant vous avancez, conscient que vous êtes censé faire quelque chose sans avoir la moindre idée de quoi ! Vous voilà donc arrivé, mortifié et interdit face à la famille, aux ossements et a l’urne, avec à vos côtés un autre invité et une immense paire de… baguettes ! Vous commencez à comprendre ? Eh bien oui, vous devez prendre les os avec les baguettes et les placer dans l’urne. Facile ? Pas vraiment ! Surtout que vous devez prendre une baguette, votre voisin prend l’autre et c’est à deux que vous devez vous exécuter ! Vous n’étiez pas prévenu, et n’avez donc pas pu vous exercer. Vous en venez à regretter de ne pas avoir joué plus aux Mikado ou à Docteur Maboule étant petit. C’est donc paniqué que vous tentez avec votre baguette de suivre en miroir les mouvements de votre compagnon de galère avec une seule pensée qui hante votre esprit : « Pourvu que je ne le fasse pas tomber, pourvu que je ne le fasse pas tomber, pourvu que je ne le fasse pas tomber ! ».
La fin de ce remplissage morbide est assez déroutante. Le maitre de cérémonie, de gants blancs vêtus, s’empare des os du cranes, qui comme nous l’avons dit sont les derniers à être placés dans l’urne et les « parade » devant les visages de la famille en les nommant. Imaginez la scène : « Alors ça c’est la mâchoire ! Ça c’est le nez, et ça euh… ça doit être un bout d’oreille… ». J’exagère à peine, mais j’ai trouvé cette pratique des plus insensibles. Je ne pouvais m’empêcher de penser que cette présentation des os du crane aux personnes les plus touchées par le décès devait être vécue de façon très traumatisante. Nous autres occidentaux avons une relation très pudique avec la mort. Avec le recul, je me dis que le caractère pour le moins « graphique » du rite mortuaire participe très certainement du mécanisme du deuil. Les cinq phases du deuil admises en psychologie (le déni, la colère, le marchandage, la dépression et l’acceptation), représentent un processus complexe, douloureux et souvent long. Cette confrontation à la mort encourage peut-être l’acceptation de l’inacceptable, à savoir la perte d’un être cher. Voir c’est croire. A cet égard, le choc de voir les reliques du défunt ne laisse guère de place au déni ou refus de la perte. Nier le tangible est impossible.
Quelle conclusion peut-on tirer du rituel funéraire bouddhiste tel qu’exposé ci-dessus ? (Je ne relate qu’une expérience vécue, des variantes sont néanmoins possibles). Ne négligez pas les travaux manuels ! Vous ne savez jamais quand votre dextérité sera mise à l’épreuve ! Et maintenant vous savez également pourquoi il est INTERDIT au Japon de planter ses baguettes dans son bol de riz : ce geste est intimement lie à la mort. Elles sont passées d’une personne à l’autre pour déplacer des ossements, et rappellent également les bâtons d’encens censés accompagner le défunt, alors ne tentez pas le diable !
De fin juin à fin juillet, la saison des pluies balaie le Japon , en se déplaçant progressivement de l’ouest à l’est. Dans la région du Kanto, la saison des pluies prend fin vers le 21 juillet, à cette date, les enfants prennent leurs vacances d’été. Le véritable été s’installe. Un été marqué par des fêtes et des feux d’artifice ; le plus connu aura lieu sur les bords de la rivière Sumida à Tokyo, événement retransmis à la télévision car celui-ci est un des plus grands au Japon.
Ce jour-là, beaucoup de femmes portent un yukata. A l’occasion d’un feu d’artifice ou d’une fête, juste après la saison des pluies, en août, des personnes, en grand nombre veulent absolument porter un yukata. Ces tenues typiquement japonaises sont onéreuses et le port de ces vêtements présentent quelques difficultés. Peu habitués à se vêtir d’un yukata, les gens pensent qu’il est difficile de marcher ainsi habillés car il nécessite beaucoup d’énergie. A l’heure actuelle, les Japonais portent de moins en moins d’habits traditionnels. Des entreprises et des grands magasins, vendeurs de kimonos veulent enrayer cette tendance.
Etant donné que beaucoup de touristes, nombre en forte croissance chaque année, sont en visite au Japon à cette saison, des activités sont organisées pour inciter les personnes à se vêtir de plus en plus d’un yukata en pleine ville.
Le quartier le plus animé, belle vitrine représentant le Japon est Ginza. Depuis 2006, l’événement ” Yukata dé Ginbura “(ゆかたで銀ぶら), la ballade dans Ginza, s’y déroule. Chaque année, la présence de 40000 personnes incluant aussi les personnes en yukata montre le succès que rencontre cet événement. L’été « à la Ginza », rendez-vous incontournable est, l’événement saisonnier, par excellence. Cette année, la fameuse « Ginbura » se déroulera le dimanche 2 août, entre le premier (1 chome) et le huitième quartier (8 chome). Ces quartiers s’apprêtent déjà à la « burabura », flânerie sans aucun but, si ce n’est faire du lèche-vitrine, des emplettes, un détour dans un café ou un restaurant sur notre passage. Le promeneur se laissant balloter par ses humeurs capricieuses, sa flânerie favorise une réelle détente.
Le terme « bura » n’est pas approprié et ne s’emploie pas pour le quartier de Shibuya ; on ne dira jamais « Shibubura ». Les nombreux magasins attirants qui jalonnent les boulevards de Ginza et fréquentés essentiellement par les adultes, allègent l’atmosphère, détendent : c’est le sens de « Ginbura ». Tous les dimanches, le quartier Ginza, fermé à la circulation, est réservé uniquement aux piétons. Le jour de la « Ginbura », les personnes en yukata sont plus nombreuses que d’habitude car leurs tenues traditionnelles leur permettront de participer aux multiples événements organisés et des faveurs leur seront accordées. Un service spécial « yukata », avec tous les accessoires compris est proposé à ceux qui en possèdent déjà un et ne peuvent le mettre par eux-mêmes. A partir de 10h, au magasin « Ginza Matsuya », les soixante-dix premières personnes profiteront d’une aide pour revêtir un yukata. Au même endroit, vers 11h, ce sera le tour d’une autre soixantaine de personnes, les premières arrivées. Autre plaisir, des quizz feront gagner des lots à plus de mille personnes vêtues en habit traditionnel Les personnes gagnantes pourront choisir parmi les lots, des sacs, des tickets de restaurant, et aussi des articles de luxe et des…yukata ! A partir de 13h, la fête se tiendra sur le boulevard « Yanagi dori », côté ouest et le boulevard « Anatsubaki dori », côté est. Sur le toit du magasin « Matsuya », une fête estivale sera également organisée.
Des photos seront prises, des instantanés polaroïd seront offerts aux personnes en yukata, au moins à une centaine de personnes.
Outre les faveurs accordées aux personnes vêtues d’un yukata, les personnes en tenue de ville pourront aussi prendre part aux événements. Trois fois dans la journée, à 13h, 13h30 et 14h, près de Ginza, côté ouest, des joueurs de « taïko », appelé «Tsukijima Goshin taïko » frapperont, avec force et vigueur leurs tambours. A d’autres endroits, dans le quartier Sumida, au « sky tree town », une boisson sera offerte au café «Aquarium pingouin » pour ceux qui sortiront en yukata. Du 22 juillet au 2 août, dans douze magasins à côté de Shibuya, des fêtes d’été seront organisées. Pendant le déroulement de ces événements, les personnes en yukata bénéficieront de réductions sur leurs achats. Un défilé de mode, la nouvelle collection de yukata, est aussi programmé ainsi qu’une remise de yukata, prêtés pour la journée et sans oublier une aide pour se vêtir.
Et vous, ne seriez-vous pas séduits par une sortie, vêtus d’un yukata, en pleine ville ?
Tokyo a été retenu pour organiser les jeux olympiques et paralympiques d’été en 2020. Le dimanche 8 septembre, à l’heure japonaise, il n’était pas difficile d’imaginer les Japonais levés tôt, devant leur poste de télévision ou sur Internet. Au moment où le président du comité Jacques Rogge a annoncé « Tokyo » , ce fut une explosion de joie ! Les Jeux olympiques entraîneront une croissance économique, estimée à trois trillions de yens selon l’annonce officielle. A l’échelle nationale, les retombées économiques générées s’élèveront à 150 trillions de yens d’après les calculs ; c’est la quatrième flèche du plan économique appelé Abénomics. Avec la longue déflation économique causant des souffrances à la population, le grand tremblement de terre et la dévastation de l’Est, tout le Japon a été ébranlé au plus profond de ses certitudes. Cette nouvelle des jeux olympiques intervient comme l’apparition d’un messie mais on ne peut se réjouir ouvertement si nous ne prenons pas en compte d’ autres aspects.
En premier, les réponses du premier ministre Shinzo Abe à des questions qui lui étaient posées sur Fukushima et son eau contaminée sont un tissu de mensonges : « Au sujet de Fukushima, il y a peut-être des personnes inquiètes mais je vous garantis que la situation est sous contrôle. A Tokyo, jusqu’à présent, il n’y a pas eu de répercussions « maléfiques » et il n’y en aura pas dans le futur. Les effets nuisibles de cette eau contaminée sont neutralisés, sous surveillance sur une distance de 0.3 km aux alentours de la centrale Fukushima. Je vous assure qu’ à l’heure actuelle, il n’y a absolument pas de problèmes de santé et qu’il n’y en aura pas plus tard. »
Au Japon, nous avons le proverbe « uso mo hoben » ( un mensonge pieux ) : le premier ministre, donc, tient des propos mensongers en toute simplicité. Quelle influence peuvent-ils avoir sur la scène internationale ? Et vous, que pensez-vous de ses affirmations ? En outre, les membres du CIO, et les journalistes étrangers semblent s’ être aperçus, au moment du vote, que ces paroles étaient mensongères.
En vérité, tous les jours, des fuites génèrent 400 tonnes d’eau contaminée, eau de surcroît stockée dans plus de milles réservoirs en mauvais état. Chaque jour, 300 tonnes d’eau contaminée sont rejetées dans la mer. En fait, les rejets ne sont pas du tout contrôlés. Mais j’aimerais pouvoir croire en les paroles du premier ministre : « Il n’y a absolument aucun problème. J’ai pris la responsabilité vis à vis d’un programme pour en arriver à une solution définitive. Je suis en train de le faire. Je pense que je peux clairement en faire la promesse. »
Cette fois-ci, c’est décidé, les jeux auront lieu à Tokyo. Or n’y aura t-il pas derrière cette décision une close cachée : j’envisage cette hypothèse à savoir, que si l’eau contaminée n’est pas assainie, les jeux olympiques seront annulés. On ne peut affirmer à 100% qu’une annulation aura lieu. Une telle situation ne s’est jamais présentée auparavant.
En réalité, un autre problème concerne l’eau. L’épreuve de triathlon est prévue dans baie de Tokyo. Or l’eau y est infestée ; il y a un taux élevé de colibacilles et il est officiellement interdit de s’y baigner. Les égouts de Minato-ku se jettent aussi dans la baie de Tokyo, la baie est tellement souillée au moment des grandes pluies. Le service de l’environnement confirme : « il y a un taux beaucoup trop élevé de colibacilles. » Si vous voyez cette eau noirâtre dans la baie de Tokyo, vous penserez en toute logique qu’il est inconcevable de plonger dans cette eau. L’entreprise des eaux japonaise possède la technique de transformer l’eau de mer en eau douce, par conséquent elle aurait la capacité d’assainir l’eau de la baie si elle s’engageait vraiment à le faire .
Je souhaite vivement que le gouvernement métropolitain de Tokyo entreprenne l’assainissement de ces deux sortes de forme de pollution des eaux avant 2020.
Par Noriko Tada, journaliste et présentatrice TV et radio (émissions économiques et informations générales)
*Nous prévenons nos lecteurs qu’il est souhaitable de s’informer sur la situation de Fukushima selon les sources actuelles. Nous rappelons que l’article a été écrit d’après les circonstances de l’année 2013.
Une, deux, trois ou quatre ? Non, je ne suis pas en train d’essayer de me rappeler comment compter jusqu’à dix (j’ai ma calculatrice pour ça) je vous parle du nombre de bises que vous pouvez faire en France pour saluer quelqu’un ! Chacun y va de sa conviction, le nombre varie, selon les régions, selon l’humeur, selon la personne en face ou selon le nombre de personnes à saluer (fatalement si vous arrivez face à vingt personnes, quatre bises par personne, ça fait vite quatre-vingt !). Les Japonais sont plus économes, ils ne se touchent pas !
A mon arrivée au Japon, j’ai dû passer mes premières semaines la joue en l’air face à des Japonaises perplexes qui ont laissé mon invitation à la bise sans réponse (je précise que je n’ai pas d’acné, n’allez pas vous faire des films, je vous vois venir !). Aujourd’hui j’ai le problème inverse. Lorsque je suis en France, je ne peux m’empêcher de faire des courbettes à tout le bout de champ (même au téléphone ! Chose qui fait beaucoup rire ceux qui n’ont rien d’autre à faire !). Bise(s), poignée de mains, accolade, ou simple courbette, entre promiscuité et frigidité, que disent ces gestes de notre rapport à l’autre ?
Le rapport au corps, voire même à la nudité (partant du principe que quand nous faisons la bise, nous portons rarement une cagoule) participe pleinement de la définition d’une culture, en cela que la codification gestuelle est répétée, mimée et transmise aux nouvelles générations. Ainsi, il serait un peu facile de dire que les Français sont des dépravés en mal d’affection et que les Japonais sont frigides jusqu’au bout des ongles ! Nous ne faisons que reproduire un schéma préétabli qui en dit pourtant long sur une société. Passons ces gestes en revue et tentons de lire entre les bises !
La bise : quel qu’en soit le nombre, la bise impose un contact direct et intime. Quoi de plus personnel qu’un visage ! Dès lors elle dénote un certain niveau de connivence. Nous embrassons un parent, un ami, ou une personne amenée à devenir un ami (présentée par un ami commun dans un contexte sociale décontracté). L’intervention des lèvres accroit le caractère personnel de l’acte. Une mère caressera de ses lèvres la joue de son enfant. Cet acte est donc intrinsèquement communicateur d’un sentiment loin d’être neutre et force est de constater qu’en France, on y arrive assez rapidement. Pas de fausse pudeur, nous communiquons sans complexe notre attachement. Au Japon, c’est plus compliqué. Tout d’abord, les amitiés se construisent sur le long terme. Il est difficile de devenir très proche d’un Japonais. Une amitié se nourrit, s’entretient, ainsi il faudra du temps pour atteindre ce degré d’intimité au Japon. Pourtant même après plusieurs années, toujours pas de bises. Pourquoi donc ? Respect oblige ! Je vais y revenir.
La poignée de main : Celle-ci s’internationalise ! Elle s’est exportée au Japon mais n’est réservée qu’aux Occidentaux. Un Japonais n’aura pas de mal à tendre naturellement sa main à un étranger, conscient de la pratique culturelle. Ce geste cordial, très usité dans le milieu professionnel en occident, est absent des bureaux japonais. On ne se touche toujours pas ! Tendre une main est une affirmation ! On se met en avant (physiquement et socialement), or ceci au Japon est interdit. Le retrait respectueux est de mise dans les relations sociales. L’effacement de soi est nécessaire, la focale est sur l’autre. Vous comprenez donc pourquoi on ne s’embrasse pas ou ne se serre pas la main au Japon. L’action en elle-même est une invasion dans la sphère personnelle d’autrui. Qui sommes-nous pour nous imposer de la sorte ? Telle est la conception maitresse des relations interpersonnelles au Japon, moins de « je », plus de « tu ». C’est ainsi que pour ne pas me blesser, certaines Japonaises qui me voyaient m’avancer pour leur faire la bise, me l’ont parfois rendue dans le but de ne pas me mettre à l’aise face à mon faux-pas. Ne pas faire perdre la face à l’autre est un pilier des relations sociales de l’archipel.
La courbette : comment fait-on alors au Japon pour témoigner un sentiment à l’autre sans le toucher ? En se courbant ! L’analyse qui suit s’applique principalement à des interactions entre adultes. Voir une maman embrasser son bébé n’est évidemment pas rare. Manque de variété me direz-vous ? Certainement pas! Prenez votre rapporteur (vous savez, ce machin semi circulaire que vous aviez dans votre cartable à l’école sans jamais l’utiliser) et mesurez le degré de respect que vous souhaitez donner ! Plus on se courbe, plus on est poli. C’est à vous de moduler selon votre position sociale vis-à-vis de votre interlocuteur. Le positionnement dans l’espace répondra en miroir au positionnement social. Si vous êtes inferieur hiérarchiquement, vous devrez l’être « géographiquement » aussi. (Conseil pour les personnes de plus d’1m80 : mettez-vous au yoga au cas où votre patron mesure 1m60, la souplesse est clef !). Pour finir, on gardera les 90 degrés bien marqués pour l’Empereur, son patron, ou le monsieur des impôts… J’ai volontairement gardé le terme « courbette » dans le but de vous rappeler qu’en France également nous avions une chose bien similaire : la révérence ! La révérence, à l’instar du baisemain, est (malheureusement ?) tombée en désuétude. Ne soyez donc pas trop prompts à condamner les Japonais pour excès de pudeur, nous avions la même !
L’accolade : je clos ce débat gestuel par l’accolade, l’embrassade ou faute de meilleur terme le « hug » américain. A proscrire ! En France, comme au Japon ! Le Français en sera mal à l’aise (surtout pour un premier contact) et le Japonais en fera une syncope. Nos amis américains n’ont aucune difficulté à tomber dans les bras du premier inconnu. Nous ne sommes pas intimes tout de même, alors pas touche !
Vous qui avez des velléités de vivre au Japon ou d’y travailler, si vous souhaitez devenir un individu à part entière, « être là » ne suffit pas ! Encore faut-il que votre existence soit formalisée dans le cadre universel et rassurant de la meishi ou carte de visite. L’échange de cartes de visite ne nous est certes pas étranger, cet acte rituel est néanmoins très codifié au Japon et représente à bien des égards votre « baptême social » sans lequel votre présence ne pourra s’ancrer dans la sphère de conscience de votre interlocuteur, rien que cela !
Prenons les choses dans l’ordre, c’est toujours mieux, et regardons de plus près cet objet d’une banalité affligeante qui revêt pourtant une importance cruciale dans votre vie sociale et professionnelle. Même s’il vous est possible d’avoir une carte de visite « privée » (votre nom, votre adresse et contacts personnels), la meishi est avant tout une preuve d’appartenance. Le Japon est une société collectiviste où l’individu s’efface à la faveur du groupe. Dès lors, votre carte sera nécessairement rattachée à un groupe d’affiliation, le plus souvent une société. La meishi, même s’il n’est pas interdit de prendre quelques libertés de design, restera sobre et répondra au format standard. On évitera les styles d’impression fantaisistes et l’accumulation de couleurs agressives (aussi connu sous le nom d’ « effet Lady Gaga »). Un peu de retenue tout de même ! Le logo de votre entité d’appartenance et nom de votre société seront les informations les plus visibles et valorisés. La société ou le groupe priment sur l’individu, et non pas l’inverse !
Maintenant que vous voyez à peu près de quoi nous parlons, que faire de cette véritable carte d’identité sociale ? A qui la donner ? Et bien à tout le monde ! C’est bien là le but ! Dès que le contexte devient un tant soit peu officiel, dégainez de suite vos meishi car votre interlocuteur ne vous attendra pas et tirera à vue ! Et gare à vous si vous n’avez plus de minutions, d’un point de vue stratégique, cela ne jouera jamais en votre faveur. Votre meishi vous permettra de vous inscrire durablement dans le cercle des connaissances de votre nouveau contact. En effet, celle-ci ne sera pas jetée mais bien rangée dans un classeur et attendra sagement le jour où vous pourrez vous avérer utile. Les Japonais entrevoient en effet leurs relations commerciales sur le long terme. Si aucune opportunité de collaboration ne se présente de suite, quid de demain ? A vous de savoir gérer votre réseau et de l’activer avec intelligence. Le fait de recevoir une meishi est une autorisation tacite de contacts futurs. Si beaucoup de temps s’est écoulé entre l’échange de meishi et le premier contact qui s’en suit, disons un email par exemple, il serait dommageable que vous ne vous souveniez plus de la personne. Gardez vos cartes de visite, elles peuvent facilement vous rafraichir la mémoire : « Ah ouais c’est le mec qui bosse en marketing chez Mitsubishi ! ».
Dernier point et j’insisterai très lourdement dessus, sachez comment donner votre carte de visite. Non ! On ne la tient pas entre deux doigts comme l’une des Cats’ eyes ou Gambit des X-men. Non ! On ne sort pas un vieux ticket de caisse pour griffonner son nom et numéro de téléphone à la va-vite (sauf en boite à 2h du matin, mais ça n’est pas mon sujet). On la donne a deux mains en se courbant et prononçant la formule consacrée «どうぞ宜しくお願い致します» (Dozo Yoroshiku onegaiitashimasu) . Parfaitement IN-TRA-DUI-SI-BLE en français, cette expression est porteuse d’un fond culturel extrêmement fort. Cette formule à caractère presque religieux est un appel à la bienveillance d’autrui. On l’emploie toujours lors de la première rencontre. On l’utilise également lorsque l’on demande un service à quelqu’un. Votre patron l’utilisera après vous avoir confié une tâche (ou vous mettra un coup de pied aux fesses s’il vous a trouvé en train de jouer au démineur !). Lorsque vous-même recevrez la carte de visite de votre interlocuteur, prenez la humblement à deux mains, courbez-vous en signe de respect et prenez le temps de la regarder quelques secondes. Cette pause culturellement codifiée sur la carte d’autrui est une marque de respect : vous considérez l’autre. Dans un contexte professionnel, cet aparté vous offrira par ailleurs le temps nécessaire pour positionner hiérarchiquement la personne à qui vous avez à faire (en regardant le titre) et également de retenir son nom. Il est toujours utile de savoir en réunion si on s’adresse au grand patron ou à l’assistant ! La meishi ne sera pas rangée de suite dans le cas de la rencontre professionnelle mais sera placée devant vous jusqu’à la fin la de la réunion. Si vous avez dix personnes devant vous, vous devrez placer les cartes « dans l’ordre » (en fonction de la position géographique de son propriétaire), chose qui vous permettra en un clin d’œil de vérifier son nom et sa fonction. Vous verrez, c’est sympa comme tout comme jeu, ça vous rappellera le « Qui-Est-Ce ? » : euh… alors, est-ce que Mr Tanaka a une moustache ?
Même si les giboulées de mars sont contrariantes, un jour ou l’autre en ouvrant la fenêtre de sa maison, une lumière subtile, un vent doux et un ciel d’un bleu pur nous ferons pressentir que le printemps est arrivé. A chacun sa manière de l’accueillir avec joie ou appréhension. Printemps en effet rime avec pollen, bourgeons et reproduction.
La personne la plus familière de son entourage proche va se métamorphoser en un inconnu arborant le fidèle masque blanc, les lunettes noires et le chapeau, la panoplie complète pour lutter contre le pollen : allergique à mère nature mais pas à nous, êtres humains ! L’éternel quizz commence : ” Mais qui est donc cette personne ? ” Ne vous faites pas d’amis à cette période, vous risquiez de ne pas les retrouver par la suite. Néanmoins les couleurs sobres des tenues vestimentaires, rehaussées par le port du masque vont disparaître devant le spectacle le plus connu du monde, la floraison des “sakura”. Progressivement leurs fleurs s’ouvrent, allant du rose frais au blanc épanoui, reflétant la lumière du jour, et pénétrent les sens des spectateurs s’abandonnant à une joie si grande qu’elle devient douleur.
Les parcs des châteaux regorgent de ” sakura ” mais les précieux ” shinadare-sakura “, identifiés et répertoriés dans des livres, souvent millénaires provoquent de grands pélerinages. Ces arbres en forme de saule pleureur, avec un tronc de plusieurs mètres de haut, étendant leurs branches sur plusieurs mètres de large, ne peuvent se laisser enfermer dans la boîte d’un simple appareil photo.
Pollen, bourgeons et reproductions !! En dehors des rangées de cerisiers en fleurs, que vois-je se profiler à l’horizon ? Le premier dimanche du mois d’avril, est célébré le ” matsuri ” shintoïste ” Kanamura ” au temple Kanayama à Kawasaki. Dès l’entrée du temple, trois chars, les fameux ” mikoshis “, attendent. Ce qui reste caché pendant tout le reste de l’année est dévoilé en ce jour unique : portés par les chars, trois grands phallus se dressent l’un de couleur rose, un autre en fer de couleur noire et un troisième plus archaïque, en bois, soulignant l’ancienneté de la cérémonie ou le mystère du sexe qui ne cesse de fasciner. Sous l’oeil attentif des photographes professionnels et des touristes étrangers affairés autour des ” mikoshis “, la procession est prévue vers midi. Malgré l’agitation des touristes autour des chars, la cérémonie n’en est pas moins solennelle.
A dix heures, le prêtre shintoïste allume le feu sacré avant de procéder à la consécration de l’autel. Le public se recueille, priant la protection des dieux pour les naissances à venir, leurs affaires, l’harmonie du couple et contre la transmission des maladies sexuelles. Devant un autre autel, de jeunes enfants en kimono dansent. Leurs pas sont lents et leurs gestes sont grâcieux. Autour des temples sont installés de petits stands remplis de souvenirs, porte-clé ou porte-bonheur sous la forme de petits ou grands pénis, sculptés dans toutes les matières et comble de joie pour les dames, des sucreries, sucettes aux formes très réaliste, de toutes les couleurs, pour soi-disant favoriser les naissances d’après les kanjis sur les emballages. Lorsque ces sucettes sont portés à la bouche, cette scène provoque beaucoup d’amusement auprès du public japonais contrastant avec l’attitude des étrangers sceptiques quant au bon goût de la farce et chacun se prête au jeu de la photo.
Au fil des heures, il n’est pas surprenant d’entendre s’exclamer : ” Oh ! Celui-là comme il est beau et bien fait. Je le veux. ” Le ton est si naturel que des rires éclatent. Au gré des découvertes la bonne humeur, des rires complices, un esprit bon enfant que ni les contraintes religieuses ou leur influence plus ou moins directe, ni l’éducation ne retiennent plus prisonniers, font surface.
Ne serait-ce pas ce rire que certaines histoires faisant allusion à la sexualité et à la sensualité déchainent afin d’alléger notre tristesse et en quelque sorte rétablir ce qui allait de travers dans la psyché, une sorte de déblocage d’une plus grande vitalité révélée.
Surprenante scène de voir parader dans la ville les trois grands phallus, le rose porté par des hommes vêtus de rose et travestis en femme, le plus grand en fer, porté par des hommes virils, et celui en bois porté par les plus anciens. L’harmonie est maîtresse. La sexualité est sacrée au Japon mais…si les ” mikoshis ” s’envolaient, ils frôleraient sur leur passage les grands bouddhas de l’Inde, se reposeraient sur le sol du Soudan, à Kartoum, devant la mosquée Al-Kabir et reprendrait leur envol pour atterir à Paris sur les Champs-Elysées. Toutes les grandes dames de ces trois religions de ces pays n’accueilleraient pas ce rite shintoïste. Est-ce que tous ces touristes étrangers et ces photographes professionnels présents en grand nombre à Kawasaki, poursuivraient-ils ces trois objets phalliques célébrés par exemple à Paris ? Parler de la sexualité, oui ! Mais d’une manière aussi réaliste, non !
L’universalité de la fertilité ou de la virilité est réduit à son état primaire, pas assez sophistiqué et qui ne peut contribuer à la grande éducation influencée par les grandes religions dont l’homme occidental se charge d’être le promoteur dans le monde entier. Sans quitter le Japon, nous avons beaucoup voyagé grâce aux ” mikoshis “, et nous repartons revitalisés et légers après une telle découverte. O Japon merci pour cette si belle simplicité.
Si vous aimez vous faire peur, nul besoin de vous rendre dans un parc d’attractions et d’attendre patiemment votre tour afin pénétrer dans une maison hantée qui a de grandes chances d’être des plus décevantes ! Non, pas besoin non plus de louer le 27 ième remake de l’exorciste, ni même de vous inspecter les pores de la peau à l’aide d’un miroir grossissant ! Vous qui aimez les sensations fortes, les poils hérissés et nuits blanches à guetter Sadako sous vos draps, je n’ai qu’un seul mot pour vous : Kabukicho! Ouuuhhhooouuuuhhhh!
Tapez donc « Kabukicho » dans google, si vous l’osez… Mieux qu’un Stephen King, plus réaliste qu’un Lovecraft, la description de ce quartier de Shinjuku a de quoi faire passer le manoir du comte Dracula pour un centre du club med ! Quoique le touriste bedonnant qui parade ses mélanomes et 20 ans d’un régime burger-pizza en se balançant sans complexe sur fond de daladirladada revêt un potentiel horrifique indéniable, mais ça n’est pas notre sujet. « Quartier chaud », « haut lieu de la pègre », « quartier des lanternes rouges », des proxénètes et autres barons de tout ce qui dans le livre de conduite de Laura Ingalls vous promet un aller simple pour le 38ième cercle des Enfers… Mais que fait la police ? La police de la bonne foi entendons-nous bien !
Remettons, je vous prie, les choses à leur place. Alors oui, Kabukicho n’a pas bonne presse. Ne tombons tout de même pas dans la psychose. Une ballade dans Kakukicho, ça n’est pas Koh Lanta ou Pékin express à Bagdad. Bars, restaurants, karaoke… Alors oui si vous vous avancez plus profondémment dans l’antre de Satan (même pas peur !) vous trouverez les love hôtels, des clubs spécialisés dans le « service aux personnes » et n’ayons pas peur des mots… des sexshops ! Cachez moi donc cette écolière japonaise légèrement vêtue que je ne saurais voir. Certes, tout cela existe bien, libre à vous de passer votre chemin, ou pas d’ailleurs, on ne vous jetera pas la pierre après tout.
Il serait tout de même bon de ne pas oublier que Kabukicho se trouve bien loin dans le classement mondial des coupe-gorges ! Fleury-Mérogis et Kabukicho, deux poids, deux mesures. Ce qui est le plus frappant, c’est la réaction des Japonais lorsque vous avouez votre déviance, i.e. vous aimez Kabukicho ! Vous pourriez leur avouer que vous êtes échangiste qu’ils en seraient moins choqués. Comment suis-je passé de l’image de gentil garçon premier de ma classe en France à un rebelle sans foi ni loi au Japon? Je ne m’en plains pas, ça nourrit mon côté Harry-Potter-qui-aurait-mal-tourné ! Les Japonais, en général plutôt les Japonaises, se disent mal à l’aise dans ce quartier et craignent que les dix plaies d’Egypte ne s’abattent sur eux/elles. Vous m’avez vu venir, nous parlons bien sécurité. Les Français du Japon sont unanimes : le Japon est un des lieux les plus sûrs au monde ! Je n’ai été témoin ou victime d’aucune agression dans ce pays, pas même un mot plus haut que l’autre ! Cela ne signifie pas qu’il n’y a pas de criminalité au Japon, il y en a ici comme partout ailleurs, mais l’échelle est bien différente.
Le statut d’étranger aide peut-être. La peur de l’autre, de l’inconnu, nous place de facto dans l’inconscient du Japonais comme l’agresseur potentiel et non l’agressé. Comme nous sommes bien élevés, il n’y a donc pas de problèmes. Plus sérieusement, les relations interpersonnelles au Japon sont telles que du respect d’autrui, profond et sincère, découle une harmonie qui se ressent grandement dans les statistiques de la criminalité de rue. En un mot, c’est purement et simplement génial ! Toi Parisien, regarde-moi dans les yeux et dis-moi que tu n’as jamais regardé par-dessus ton épaule tard le soir en rentrant chez toi ! Pareil pour vous, Mesdemoiselles ! Dites-moi que vous n’avez jamais discriminé contre une jolie jupe courte pour une sortie nocturne ! Vous ne pouvez pas, n’est-ce pas ? Le sentiment de peur de l’agression est quasi inexistant au Japon, il l’est totalement pour moi, qui par surcompensation classique entre en syncope dès que je suis à Paris passé 20h : mode ninja activé, on rase les murs, on range son iPhone et surtout on ne regarde personne dans les yeux, sait-on jamais… Par opposition, les Japonais en visite à Paris qui eux n’ont eu à développer ces mécanismes de survie, se trouvent parfois fort dépourvus quand non pas la bise mais l’agresseur fut venu ! Je vous reparlerai du « syndrome de Paris », c’est assez édifiant !
Je reviens sur Kabukicho pour clore cet éloge à la sécurité japonaise. J’aime ce quartier qui est vivant, mais également intimiste. Les bars et restaurants sont majoritairement petits (comme c’est souvent le cas sur Shinjuku, notamment dans le quartier « Golden Gai », nous y reviendrons) chose qui pousse plus facilement à l’ouverture d’une conversation avec son voisin. Par ailleurs, pour les amoureux de musique rock ou métal, Kabukicho regorge de petits bars très sympas dont la découverte au détour d’une ruelle n’est souvent que le fruit d’un malentendu. Stop à la paranoïa et surtout bonne soirée à Kabukicho ! A la vôtre !
Alors Messieurs ! Vous qui venez d’arriver au Japon, je sens d’ici votre envie de vous plonger au plus vite dans la culture locale ! (Par culture locale entendez « get in da game ! »). Si vous voulez séduire, veillez à éviter certains écueils qui vous conduiront droit à l’échec. Oubliez la terrasse ombragée, la balade romantique sur les quais de Seine ou même la bouteille de champagne hors de prix qui vous a conduit droit à la dialyse suite à la vente de vos reins sur eBay. Je n’ai qu’un mot pour vous : l’aquarium !
Oui vous avez bien lu, l’aquarium, celui-là même avec tous les petits poissons trop mignons qui nagent sans souci dans les eaux de l’amour. C’est THE place to go si vous voulez séduire la belle. Quoi de plus romantique que de déclarer votre flamme sous les yeux émerveillés d’une raie Manta ? Le Tokyo Sealife Park, situé à 5 min de la station JR Kasai Rinkai Koen, répondra à toutes vos attentes, et même plus ! Pour seulement 700 yens (ok, 1400 yens car il y a des limites à la radinerie et il serait de bon ton d’offrir à l’élue de votre cœur son laissez-passer au paradis aquatique de notre ami Nemo) vous vous assurerez un contexte ludique, peu onéreux, et surtout très apprécié par la gente féminine nippone.
Pourquoi tant d’engouement pour l’aquarium ? Est-ce l’attrait de se retrouver sous l’eau sans avoir les cheveux mouillés ?(si vous imaginiez faire des efforts, pensez à votre demoiselle qui, elle, a passé trois heures sur son brushing !). Est-ce le retour en enfance ? (statistiquement, 90% des visiteurs d’aquariums ont moins de 12 ans, âge mental inclus) ou le cri des sirènes qui attire les jeunes japonais dans leurs filets d’algues hypoallergéniques? (bons pour la peau au demeurant). Peu importe puisqu’au final cela semble faire des merveilles. Ne vous méprenez pas, vous ne serez pas dispensés du nécessaire et oh ! combien grisant marivaudage. Même si cette sortie amoureuse peut vous sembler enfantine, voire mal à propos, il faut bien l’avouer, l’aquarium offre un contexte calme, original et propice aux échanges galants.
Par ailleurs, ne me dites pas que vous êtes à jour de votre inventaire ichtyologique (oui ça veut dire poisson !) et qu’il ne vous est jamais arrivé de confondre les nageoires dorsale et caudale ! N’attendez plus, tous à vos tubas et surtout bon courage. Dernier conseil pour ce rendez-vous galant : si vous arrivez à finir votre rancard par une glace qui contient du collagène (le collagène, sa vie, son œuvre, dans l’industrie cosmétique japonaise, c’est toute une histoire), je ne vais pas dire que c’est gagné car en amour, rien n’est jamais acquis, mais c’est plutôt bien parti !
Si le Japon est bien connu pour ses cerisiers, ses combats de sumos, ses temples majestueux, ses avancées high-tech ou sa pop culture manga, il n’empêche que pour qui pense « Japon », les mots « heures sup’ », « travail » ou « burnout » ne sont jamais loin ! sAMOURai vous parle culture, n’oublions pas la culture d’entreprise ! Celle-ci est très représentative des relations sociales au Japon mais parfois aussi d’un certain mal-être. Stress, pression hiérarchique, regard de l’autre, envie de bien faire, il faudrait apprendre à relativiser histoire de ne pas trop se gâcher la vie.
Nous passons le plus clair de notre temps au bureau, ne vous en déplaise, ainsi je suis partisan du « autant faire que ce temps soit le plus agréable possible ». Travaillant dans les ressources humaines (voilà, vous connaissez mon vilain secret !) je suis très régulièrement amené à recevoir des employés japonais au bord de la crise de nerf, à qui la pression fait le plus grand mal. Moi je dis : halte au stress ! Je suis de parti pris n’ayant effectivement pas grandi dans un contexte japonais et suis dès lors rapidement tenté d’appeler au relativisme, surtout sur les choses qui nous dépassent. En France nous y allons à coups de « il n’y a pas mort d’homme », « ça n’est pas grave » ou « ça n’est pas moi qui en ai la charge ! », chose qui n’empêche évidemment pas l’efficacité et le sérieux au travail, bien au contraire. Il s’agit de savoir faire la part des choses sans tomber dans le je-m’en-foutisme, ni empiéter sur l’heure de l’apéro !
Nos amis japonais ont bien une expression de détachement (仕方がない, shikata ga nai) très usitée et presque intraduisible car employée souvent et dans des contextes variés. Cette expression se rapprocherait d’un « on n’y peut rien », « c’est comme ça »… D’expérience j’aurais tendance à dire que si les Japonais savent identifier les choses qui ne dépendent pas d’eux et le verbaliser, force est de constater que le cœur, lui, ne suit pas ! Le sens de la responsabilité au Japon est poussé à l’extrême et le Japonais désireux de bien faire n’aura aucune difficulté à se blâmer pour des choses qui lui échappent et à s’en excuser ad nauseum. On parle souvent de la politesse japonaise, en voici un bon exemple. Dans une société de services où le consommateur n’est pas roi mais quasi-divin, le client (お客様, okyakusama) aura tous les droits et surtout celui de se plaindre. Défaut de fabrication, retard de livraison, malfaçon visible uniquement au microscope électronique à balayage, tous les prétextes sont bons pour tyranniser les services après-vente, parfois poussant le bouchon vraiment trop loin ! Autant vous dire que les SAV français n’ont pas la patience de leurs homologues japonais. La France pourrait dans certains cas se montrer plus à l’écoute de ses consommateurs et le Japon apprendre à dire « Non ! Ton sac Vuitton était nickel alors ne pense même pas à un remboursement ! Je vois bien que tu l’as passé au four micro-onde ! ».
Comment donc se positionner ? Entre le trop et le trop peu, la frontière est floue. Quand relativisme devient négligence et responsabilité devient obsession, c’est tout un système qui s’effondre, ou du moins qui crée des situations professionnelles intenables. Notre approche comparative s’avère ici inestimable. Je grossis volontairement les profils afin de sublimer les apports culturels possibles et souhaitables entre deux pays où le travail est important, mais perçu de façon différente. Le Français aura tendance à s’en tenir à ses tâches et elles seules, là où le Japonais prendra le poids du monde sur ses épaules. Le Français sait relativiser et prendre du recul, le Japonais voit l’apocalypse dans toute critique. La conclusion semble s’imposer d’elle-même et se trouve dans l’entre-deux. Vous allez me dire que vous voilà bien avancés ! Certes, ce message est bien cryptique, mais c’est la démarche analytique qui compte. En effet, si vous souhaitez comprendre vos partenaires commerciaux, apprenez d’abord à comprendre leur façon de travailler. Cet effort de dépassement des barrières culturelles vous aidera sans nul doute à développer des relations commerciales saines et de long terme. Au passage, libre à vous de vous approprier des solutions « autres », d’évoluer dans vos analyses, de sortir des terrains battus mais aussi d’offrir à l’autre des alternatives. Le changement n’est pas le mal absolu, l’inertie, elle, n’est que paresse intellectuelle… Bon ça n’est pas le tout mais il est 18h01, ciao !
A l’heure de la diffusion du journal, le présentateur annonce les faits divers les plus anodins et les plus importants enchevêtrés les uns dans les autres sans aucun lien entre eux, seule la rapidité du débit des paroles dans une durée chronométrée standardise les propos. Soudain, une émotion imperceptible mais grandissante traverse l’écran. Un homme, à la voix étranglée, terrassé par un drame, n’explique rien, mais répéte indéfinement : « Nous allons reconstruire ». Derrière lui, le restaurant au nom historique « kanda-yabusoba », construite en 1880, est réduite de moitié, l’autre moitié est calcinée, les flammes ont fait disparaître quatre générations d’histoire et le bonheur des clients entretenus dans ce lieu hors commun ; mais que deviennent les maisons anciennes au Japon ? Certaines demeures d’un usage strictement privé peuvent-elles devenir un lieu public ?
L’habitat, moins accessible au regard du curieux, reproduit un aménagement assez classique de quelques pièces au rez-de- chaussée, en général, s’accomandant de l’espace, la salle d’eau est située dans le même axe que l’entrée. Au téléphone, « uka ga imasu » c’est à dire « j’arrive ! », est en soi la manière la plus répandue d’annoncer son « intrusion » prochaine chez une personne au Japon. Il serait inutile de courir dans tous les sens pour recevoir la personne en question. Imaginons que l’hôte soit un Français, son premier réflexe sera d’effacer toute trace de désordre, en premier lieu fromage et bouteille de vin…Affolement inutile…car… la visite ne se déroule pas au delà de l’entrée : la marche qui sépare l’entrée du reste de la maison servant de garde-fou. Qu’importe le nombre de visites, personne ne se déchaussera. Mais il est aussi d’usage de ne pas prévenir de sa visite, ni de sonner et d’apparaître avec assurance et soudainement dans l’entrée : si le maître des lieux se trouve dans sa salle de bain, il ne pourra pas en sortir. Incident imprévisible ! Les férus de la méthode du « Fen Shui », y verront une interaction entre le secteur « relations humaines » et la salle de bain. Ou simplement l’entrée principale, par commodité, devient un passage public, héritage de l’habitude d’antan de faire coulisser les panneaux en bois qui servaient de porte : accès aisé et facilité de communication !
Les demeures qui ont traversé tous les âges, en particulier la maison « Chihan’an » situé à Ohito sur la péninsule d’Izu, a déjà célébré ses 206 ans, et la maison surnommée « Chigasaki-kan » marquée par une grande fêlure dû au tremblement de terre de 1923 sur le sol de sa salle d’eau, décidemment un lieu mémorable, n’en ont pas moins une destinée extraordinaire.
Héritière du domaine « Chihan’an », née ainsi tous ses ancêtres
dans ce lieu, Nobuko Awaya, professeur d’art a laissé les portes ouvertes au grand public, son grand-père amoureux des poètes, a reçu auparavant beaucoup d’artistes ; depuis l’époque d’Edo des personnes n’ont cessé d’affluer pour marquer les grandes célébrations de la vie de toute la communauté. Ce lieu de vie, de culture s’exprime à travers les événements qu’organise Nobuko.
En 2013, une centaine de personnes a assisté à un récital offert par une flûtiste américaine et un violoncelliste japonais. Jane Rigler a séjourné dans la maison pour enregistrer tous les bruits. De sa flûte, le bruissement des feuilles de bambous, le tintement de l’horloge, les annonces sonores de la ville, tout est devenu musical, des notes harmonieuses, inqualifiables et émouvantes.
En 2014 entre le 1er et le 8 novembre, une artiste française, Céline Andrieu expose ses oeuvres, faits de parchemins et d’anciens livres, une tentative de jouer avec les contrastes de l’intemporel et le temporel. Espérons que le public français sera au rendez-vous !
« Chigasaki-kan » est connu pour avoir reçu et logé le réalisateur Yasuhiro Ozu. Celui-ci, inspiré par le lieu, y écrivit ses films et dessinat des prises de vue pour des scènes, à l’époque où il n’y avait pas d’appareil-photo. En 2013, revenu de Cannes, le réalisateur Hirokozu Kore-Eda , célèbre pour son film « Nobody knows » qui a fait le tour du monde, puis plus récemment pour « Chichi ni naru », a témoigné son admiration pour Ozu à « Chigasaki-kan » devant une audience très attentive. Il faisait partie de ses jeunes réalisateurs qui ont séjourné à « Chigasaki-kan » pour écrire. Cet endroit est un lieu de culte. Cet événement est relaté parmi tant d’autres à « Chigasaki-kan ».
Longue vie à toutes ces belles demeures ! Chihan-Art.com
Cet exercice est destiné aux amoureux de la langue française et en particulier aux étudiants japonais. Le monde animalier est courant dans la langue française, chaque animal possède un trait de caractère ou physique qui nous caractérise. Mais aussi toutes ces expresssions rendent la langue plus imagée et vivante. Une fois le texte traduit dans les autres langues et en l’occurence en japonais, les effets escomptés ne sont pas les mêmes. Le lecteur japonais déconcerté va d’abord se demander s’il ne s’agit pas d’un traité sur la zoologie et s’apercevant ensuite qu’il s’agit d’un homme qui a un rendez-vous, le récit n’échappera pas à son sens analytique. Finalement, l’homme en question, après avoir ressenti différents états, attente, impatience et autres, est finalement déçu de la personne avec qui il avait rendez-vous. Il est facile d’imaginer le septicisme du lecteur japonais concernant cette prétendue sentimentalité dont fait preuve l’homme français dans ce texte. En somme, toute cette histoire pour en arriver à aucun dénouement…Mais au contraire, laissez vous emporter par la magie des mots. Il est bon aussi de rire pour rien.
“Myope comme une taupe”.”Rusé comme un renard”?…Les termes empruntés au monde animal sont partout. La preuve :
Que vous soyez fier comme un coq, fort comme un boeuf, têtu comme une mule, malin comme un singe, chaud lapin ou fine mouche, vous êtes tous, un jour ou l’autre, devenu chèvre pour une caille aux yeux de biche. Vous arrivez frais comme un gardon à votre premier rendez-vous et là, pas un chat ! Vous faites le pied de grue, vous demandant si cette bécasse vous a réellement posé un lapin. Le type qui vous a obtenu ce rancard, avec lequel vous êtes copain comme cochon, vous l’a certifié : “Cette poule a du chien, une vraie panthère !” C’est sûr, vous serez un crapaud mort d’amour. Mais tout de même, elle vous traite comme un chien. Vous êtes prêt à gueuler comme un putois, mais non, elle arrive. Bon, dix minutes de retard, il n’y a pas de quoi casser trois pattes à un canard. Sauf que la fameuse souris, avec sa crinière de lion, elle est en fait plate comme une limande, myope comme une taupe, elle souffle comme un phoque et rit comme une baleine. Vous restez muet comme une carpe. Elle essaie bien de vous tirer les vers du nez, mais vous sautez du coq à l’âne et finissez par noyer le poisson. Vous avez le bourdon, envie de verser des larmes de crocodile. Vous finissez par vous inventer une fièvre de cheval qui vous permet de filer comme un lièvre. Vous avez beau être doux comme un agneau, faut tout de même pas vous prendre pour un pigeon !